archive | PSYCHOLOGUES RSS pour cette section

Prier c’est méditer ?

En quoi se différencie-t-elle de la prière ?

Dans la prière, on s’adresse à quelqu’un – Dieu – et il y a une intention : demander, remercier, célébrer… On utilise des mots. Dans la méditation de pleine conscience, il s’agit de se rendre présent à ce qui est là, à soi, à sa respiration, à ses pensées. Autant dire que cela semble se situer à l’opposé : on ne s’adresse à personne, on n’attend rien, on essaye d’être dans ce qu’on éprouve, sans avoir besoin de recourir à des mots. Ces pratiques semblent donc contradictoires.

Pourtant, je pense qu’en réalité, elles sont très complémentaires. Il me semble que notre prière ne peut pas être profonde, juste, monter vers Dieu, si elle n’est pas précédée d’un temps où l’on fait silence, où l’on se libère de ses cogitations.

Priez-vous ? Et, si oui, comment articulez-vous prière et méditation ?

D’abord je médite, pour me rendre présent au moment, puis je prie. Il m’arrive aussi de simplement vouloir méditer, sans avoir l’intention de prier. Je m’assieds, je ferme les yeux… et, sans que je m’y attende, me voilà emporté. J’ai soudain le sentiment d’appartenir au monde, l’impression que les frontières entre ma petite personne et l’Univers deviennent poreuses, un sentiment d’interrogation existentielle m’étreint : « Pourquoi suis-je ici à respirer ? » Apparaissent ainsi parfois des états qui appellent la prière, les sentiments de gratitude, de transcendance.

Moi, je suis chrétien, donc je me dis : « Tu as ouvert ton âme à plus grand que toi, tu ressens, de façon très simple, que tu es un petit récepteur et qu’il existe un grand émetteur qui envoie des signaux. » Je pense que la méditation est bonne pour la foi. C’est une manière d’approfondir sa prière, de l’ouvrir à de nouvelles voies, peut-être avec moins de mots et davantage de ressenti corporel. N’hésitez pas, allez-y !

Comment pouvons-nous associer prière et méditation ?

Je pense que pour nous, gens ordinaires, tout est affaire de régularité et de répétition. Par exemple, lorsque l’on s’assoit face à la mer, on est d’abord dans la simple présence apaisée. Mais si l’on reste un peu, on peut ressentir de la reconnaissance envers le Dieu qui nous permet de vivre cet instant. Puis, si l’on pousse encore un peu, le sentiment de Sa présence en nous et autour de nous.

Quand je médite, souvent, je franchis trois étapes : corps, esprit, âme. Quoi qu’il arrive, je commence par prendre conscience de mon corps : dans quel état il est, ce que je ressens, comment je respire. Puis j’examine mes idées : de quoi j’ai envie, ce qui me préoccupe. Parfois, tout cela suffit à nourrir ma méditation, notamment quand je suis soucieux ou anxieux.

Mais parfois, je sens qu’il faut que je pousse encore plus loin. J’essaie de m’ouvrir à plus grand que moi, de me dire : « Tout est bien. N’aie peur de rien, continue d’avancer. » Parfois, je me dis : « De toute façon, tu es dans la main de Dieu. Donc fais de ton mieux et accepte de te laisser porter. Respire, souris, remercie pour tout ce qui t’a déjà été donné. » Là, je ne suis pas dans la méditation pure, mais dans la prière. Je m’accroche au bas de la robe de Dieu !

Qu’a apporté la méditation à votre vie spirituelle ?

Elle l’a considérablement enrichie. Dès que l’on nourrit sa vie intérieure par la méditation, on aboutit à des interrogations d’ordre spirituel. En ce sens, la méditation a réactivé, nourri, multiplié mes temps de prière. Chaque soir, quand je songe aux bonnes choses que j’ai vécues durant la journée, je passe rapidement « en mode prière ». Je repense à trois moments agréables et je dis : « Merci, Seigneur, Tu m’as permis de vivre cela. » Quand j’ai l’impression que je peux mourir, et que cela n’a pas lieu, je Le remercie.

Il y a quelque temps, j’attendais des résultats médicaux à l’issue très incertaine. Je suis allé prier dans la chapelle de l’hôpital. J’ai médité puis j’ai remercié. J’ai dit : « Je ne sais pas ce qui va m’arriver, je Te fais confiance. Mais quoi qu’il m’arrive, merci de m’avoir permis de vivre tout ce que j’ai vécu. » Je crois vraiment que la méditation m’a aidé à aller plus souvent à la rencontre de moments comme ceux-là.

Après avoir médité, parfois je prends la Bible. Je vais chercher des passages que j’explore à l’infini. Mes préférés sont les Psaumes, le Livre des proverbes, l’Ecclésiaste et le Livre de Jérémie.

La méditation n’a pas pour vocation de se substituer à la prière mais de la rendre plus profonde et plus féconde

 

En quoi la méditation peut-elle aider les chrétiens dans leur foi ?

La méditation de pleine conscience, laïque, a occupé une place délaissée petit à petit par la tradition chrétienne. Aujourd’hui, l’Église s’aperçoit qu’elle n’a pas vu venir la vague méditative, qui répond à un besoin d’intériorité. Au croyant, je dirais volontiers la même chose qu’à un patient : méditer ne remplacera pas les soins mais va s’y ajouter. De même, la méditation n’a pas pour vocation de se substituer à la prière mais de la rendre plus profonde et plus féconde.

Christophe André